Fleischschnaka, qui a dit que ce mot était imprononçable ? (et qui sait ce que c'est?)
Les fleischschnaka (prononcées flaï-ch’-na-ka) sont sans hésiter ma spécialité culinaire alsacienne préférée. Et pourtant, ce n’est pas la plus courante, loin de là. D’ailleurs, j’ai un critère bien à moi pour déterminer la qualité d’un livre de recettes alsaciennes : je regarde l’index et si la recette des fleischschnaka y est absente et bien, je repose le bouquin. Les fleischschnaka, ce sont des escargots à la viande. Comme les escargots que vous achetez chez le pâtissier pour vos petits déjeunés dominicaux ou pour votre goûté mais la pâte feuilletée est remplacée par de la pâte à pâtes (ou pâte à nouilles pour être plus claire) et la farce est constituée de viande ; de viande à pot-au-feu pour être précise. On les trouve à la carte de certains restaurants du coin, mais ils sont une minorité ; en Alsace (et même en Lorraine) on en trouve aussi sous vide au supermarché (mais pas constamment)… cependant je doute que ce soit le cas partout en France et surtout, la version sous vide n’est pas franchement un honneur à la gastronomie alsacienne, et une fois que l’on a goûté à des véritables fleischschnaka maisons, retourner à la version sous vide vous semblera une hérésie.
Certes, ne nous leurrons pas, c’est du boulot.
Mais qu’es ce que ça peut en valoir le coup !
On a fait ça à quatre mains avec N. à l’occasion d’un repas de noël en tête-à-tête. On avait bien conscience qu’on devait être le seul couple à faire des fleischschnaka pour noël, mais qu’importe, nous avions envie de fleischschnaka, nous avions envie de les faire nous même (depuis le temps que ça me titillait !) et les dindes, les chapons et autres réjouissances de décembre ne nous branchant pas plus que ça, on n’a pas hésité longtemps.
On a un peu tout fait à l’envers puisque traditionnellement, les fleischschnaka sont réalisées car il y a des restes de pot-au-feu et qu’il faut bien les utiliser. Mais il était hors de question que je mange du pot-au-feu (pouah !) alors on a fait du pot-au-feu EXPRES pour réaliser les fleishschnaka.
Recette pour 5 personnes
Pour 14 petits rouleaux (compter trois rouleaux par personnes, parfois même deux)
Vous pouvez facilement doubler les proportions (il suffit d’avoir une grande cocotte) mais je vous déconseille de les diviser par deux car je ne suis pas sûre que l’on arrive au même rendu, de plus ce serait beaucoup de travail pour pas grand chose (alors que vous pouvez toujours en congeler une partie)
La pâte à nouilles
150g de farine
2 œufs (environ 110g d’œuf)
Du sel
75g de semoule fine de blé dur
Un peu d’eau (je dirais moins de 50mL, à voir…)
La farce
1 oignon
2 carottes
2 navets jaunes
2 navets violets
1 poireau
3 gousses d’ail
3 échalotes (1+2)
600g de viande à pot-au-feu (ici moitié hautes côtés, moitiés plate côtes) Note : si votre morceau comporte un os, il faut 600g de viande sans l’os
Persil
Ciboulette
Muscade
½ cuillère à soupe rase de sel
5 grains de poivre noir
2 baies de genièvre
1 clou de girofle
1 pincée de thym
1 feuille de laurier
1 noisette de beurre
1 poignée de feuilles de persil plat
1 œuf
25g de chapelure
Un (bon) filet d’huile d’olive
300mL de vin blanc
Préparer la pâte à nouille :
Dans un grand bol, mélanger la farine, la semoule et le sel. Ajouter les œufs, mélangez bien à la cuillère en bois, puis ajouter un peu d’eau afin d’obtenir une pâte homogène (si vous ajoutez trop d’eau vous ne pourrez pas former de boule de pâte, il faudra alors rajouter un peu de farine – mais ce n’est pas dramatique). Pétrir ensuite à la main et former une boule de pâte, la fariner un peu et l’emballer dans du papier film. Laisser reposer au frigo au moins une heure à température ambiante.
Préparer le pot au feu :
Éplucher l'oignon, réserver.
Éplucher les carottes, les rincer, les couper en deux. Réserver.
Éplucher les navets, les couper en quatre. Réserver.
Couper le poireau en deux dans la longueur, le laver et découper en deux chaque moitié. Réserver.
Éplucher les gousses d’ail. Réserver.
Éplucher une échalote, la couper en quatre. Réserver.
Dans cocotte, faire revenir la viande. Quand elle est légèrement colorée, ajouter les légumes (oignon entier, carottes, navets, poireau, ail, échalote).
Saupoudrer de persil haché, de ciboulette ciselée, de muscade et de sel. Ajouter les grains de poivre.
Mettre dans un sachet-filtre à thé en papier les baies de genièvre, la girofle, le thym, le laurier. Ajouter ce bouquet garni dans la cocotte.
Mouiller à hauteur avec de l’eau, porter à ébullition, écumer puis baissez le feu et laissez mijoter au moins trois heures ; jusqu’à ce que la viande soit très tendre, fondante. (Si la recette est réalisée dans une cocotte minute, le temps de cuisson s’en verra réduit).
Préparer la farce :
Verser le contenu de la cocotte dans une passoire ou un chinois, recueillir l’ensemble du bouillon et le garder précieusement. À ce stade, votre cuisine doit embaumer, sinon c’est mauvais signe ^^
Retirer (et jeter) le sachet contenant le bouquet garni, récupérer les morceaux de viande, enlever les os si il y en a, dégraisser les morceaux de viande et les mettre dans un mixeur (ou hachoir) avec la moitié des navets, la partie blanche du poireau (mais pas de carotte ni d’oignon ! C’est mon avis personnel). Hacher.
Éplucher et émincer finement deux échalotes.
Faire chauffer une noisette de beurre dans une poêle, y faire revenir les échalotes. Elles doivent devenir fondantes, blanchir mais pas brunir, ajouter ensuite le hachis de pot-au-feu. Rectifier l’assaisonnement en sel, poivre et muscade.
Laver le persil plat, en récupérer les feuilles (une bonne poignée) et les ciseler finement. Ajouter le persil à la viande. Mélanger.
Ajouter dans la poêle un œuf, la chapelure et 50mL du bouillon (ne jeter toujours pas le reste de bouillon !!) et mélanger vivement. La farce est prête. Réserver.
Dans une bouteille en verre vide (en plastique, elle risque de souffrir un peu de la chaleur), placer un entonnoir, y déposer une compresse sans la déplier afin de garder les épaisseurs, filtrer ainsi le bouillon restant. Il vous faudra sans doute changer plusieurs fois de compresse mais cette méthode permet de dégraisser au moins partiellement le bouillon : l’épaisseur de compresse empêche une bonne partie du gras de passer avec le bouillon. Réserver votre bouteille de bouillon maison.
Réaliser les fleischschnaka :
Tapisser le plan de travail avec de farine, y déposer la boule de pâte, la fariner et l’étaler au rouleau à pâtisserie en un rectangle de 30 centimètres x 30 centimètres. Répartir la farce (en veillant à garder 2 centimètres de pâte de chaque côté) puis la tasser avec les mains.
Rouler la pâte sur elle-même, en escargot (comme pour les sushi) avec délicatesse et sans rapidité. Arrivé à la fin du rouleau, mouiller le bord de pâte vierge de toute farce avec un peu d’eau (pour aider les deux pâtes à coller ensemble).
Envelopper le boudin obtenu dans du papier film fariné (sinon quand vous voudrez déballer le boudin il va coller au papier) et entreposer au frigo jusqu’au moment du repas. Nous, on avait préparé les fleischschnaka la veille, mais si vous les préparez le jour même, je vous conseil quand même un passage au frais afin de pouvoir découper plus facilement des tranches. Enfin, ce n’est que mon avis.
Cuisson de la bestiole :
Après avoir éliminé les extrémités (quignons), découper d’épaisses tranches dans le boudin. Bon, je sais pas vous mais je pense que vous êtes dans le même cas que moi : vous n’avez pas de poêle du diamètre de la panse d’un ogre donc, cuisson en deux ou trois fournées. À chaque fournée, faire dorer (mais pas cramer hein...) les escargots recto verso dans l’huile dans la poêle et ajouter ensuite 100mL de bouillon et 100mL de vin blanc (sylvaner si vous voulez rester local) et laisser cuire dix minutes à feu moyen et en n’oubliant pas de retourner les escargots à mi cuisson ou régulièrement pendant la cuisson. En fin de cuisson, il n’y aura plus vraiment de bouillon
Note : selon que vous optiez pour une cuisson en deux ou trois fournées, il vous faudra soit dans le premier cas 200mL de bouillon et 200mL de vin blanc ; soit dans le deuxième cas 300mL de bouillon et 300mL de vin blanc. (Vous me suivez ?). De plus, si vous avez des restes, pour les réchauffer opérer de même : les faire chauffer dans une poêle avec un mélange 50/50 bouillon/vin blanc.
Servir avec une salade verte.
Vous pouvez aussi les servir avec une sauce de viande mélangée à un peu de bouillon puis réduite à feu doux jusqu’à la consistance désirée. Je ne peux pas vous en dire plus, c’est du ressort de N. ce genre de choses.
Boire avec du vin blanc (mais avec du champagne ça allait aussi ^^)
C'était délicieux et on a passé un merveilleux moment à la fois à les réaliser à quatre mains et à les déguster, of course! Je tiens quand même à préciser que d'habitude la farce prend moins le dessus dans l'escargot, je vous conseille donc de faire une pâte à nouille plus épaisse ou de mettre un peu moins de farce...
Alors, tenté?