Oui, j’aime le luxe hype (et j’assume !)
Dans la famille « Je transforme tout ce que je touche en or », après la fille, je demande le fils.
Richard Meier tenait, il y a quelque temps « La rivière », sorte de bar à tapas luxueux, branché et asiatisant (oui, déjà à l’époque…) juste à côté du restaurant de sa sœur.
Il a maintenant déménagé grand’rue : nouveau lieu, nouveau nom, nouveau concept. Oui, un lieu hype et conceptuel. C’est moderne, c’est tendance et c’est sans doute le dernier endroit où être vu à Strasbourg.
Les photos de l'interieur du lieu ne sont pas les miennes mais celle de ©Laurianne Ceneda.
De l’extérieur, on ne peut rien deviner. C’est une façade tout en discrétion. Vous, strasbourgeois, vous passez régulièrement Grand'Rue non ?… Vous êtes forcément déjà passé devant… mais vos yeux se sont-ils déjà arrêtés sur cette façade ? J’en doute. Rien n’est là pour attirer le regard : pas d’enseigne, une carte bien cachée… Mais le soir, parfois les rideaux se lèvent et laissent entrevoir des lumières tamisées…
Dès l’entrée, on ne peut que remarquer le soin tout particulier apporté à la décoration des lieux. C’est sobre, original et très design (tient tient tient… en écrivant cette phrase je me dis que ces adjectifs collent aussi au contenu de nos assiettes….). Au rez-de-chaussée, le bar, je pense qu’il est adéquat de lui associer l’adjectif lounge. Asseyez vous devant le bar tout en inox, ou dans des canapés bien molletonnés en velours violet… pour y prendre un verre avant de manger, ou pour y boire un verre tout court. Les lumières sont très tamisées, quelques bougies, quelques luminaires bien pensés et sophistiqués; et les murs recouverts de grandes toiles contemporaines. On y sert les « savories », petits plats dégustation, travaillés autour du cru « Huîtres au gingembre » « Thon aux herbes et au citron », du froid « Salade de Shitakés » « Salade de papaye verte et méduse à l’orange », de la vapeur « Boulette aux épices » « Raviolis à la daurade », du frit « Nem croco » « Boulette de crevettes Hiroshima », du grillé « Brochette de boeuf aux feuilles de citronnier » « Brochette de poulet à la confiture de mangue piquante », du cuit-cru « Sashimi de thon à la framboise épicée », du sucré « Glace gingembre en beignet chaud » « Fondant au chocolat, confiture aux cinq épices ». Vous l’avez deviné, ici aussi des petites touches d’Asie ponctuent chaque plat.
On monte ensuite l’escalier de ce lieu conçu comme un grand loft, tout est ouvert… de la salle du restaurant on peut plonger dans le bar et des moelleux sofa on devine les gens déjà attablés. Et pourtant les deux étages restent tout de même séparés d'une certaine façon. En haut, l’atmosphère est la même au son près : à la musique de fond s’ajoute le brouhaha des gens déjà attablés. C’est chic et moderne. Là encore les luminaires sont savamment choisis, ainsi que tous les décors : les bougies à table, les couverts, les murs bruts sur lesquels trônent des toiles toujours très modernes. Au fond de la salle un mur de verre sépare la salle de la cave à vin, des murs aux pierres apparentes et des bouteilles sagement alignées…
Ce restaurant est conceptuel. Le mot est lâché. Et le concept en question est issu du kaseiki, un banquet traditionnel des samouraïs japonais qui « repose sur la théorie quantitative de la déraison du goût. » L’originalité de la chose c’est que vous ne choisissez qu’un plat, la composante principale de votre menu et ensuite vous laissez le cuisinier choisir les mets qui l’accompagneront. Vous pouvez décliner votre repas en 5, 7 ou 9 mets et c’est donc le cuisinier qui décidera pour vous des mets qui accompagneront au mieux votre plat. Il faut lui faire confiance, ne pas cherche à tout contrôler et se laisser surprendre par une succession de petits plats.
« Des mets dans lesquels les saveurs
(acide, sucrée, salée, amère et piquante)
trouvent justement leur place
et côtoient les couleurs, les textures et les arômes. »
J’ai choisi comme plat des Gambas à la plancha citronnelle verveine et soba au basilic, légumes grillés.
On pouvait aussi opter pour le « Magret de canard laqué, bouillon caramel jasmin, pomme fruit salée à l’anis » ou un « Tataki de thon, salade de wakamé », le « Carpaccio de saint jacques, mousse de noisette » ou le « Filet de bœuf aux trois gingembre, racines de lotus, frites de patate douce »
Rassurez vous, n’ayez pas peur, les 5, 7 ou 9 plats ne sont pas too much : moi j’avais opté pour les Gambas en 7 mets. Une succession de 6 mini mini plats ont débarqués devant moi. Avec un sens de la marche à respecter en ce qui concerne la dégustation.
J’ai commencé par un velouté de patate douce à boire à la paille. C’était fin et très réussi car il avait réussi à s’affranchir du côté douceâtre de la patate douce, vraiment très bon. Ensuite il y avait un carpaccio d’ananas au basilic, simple mais le basilic n'avait pas assez de goût je trouve. En troisième position venait LE truc que je n’ai pas aimé : une gelée de crème de coco aux herbes, sans toute à base d’agar agar. Mais moi, que ce soit de la gélatine ou de l’agar agar, j’ai beaucoup de mal avec les trucs fleubeuleubeuleu (comprendre gélatineux). Après c’était tempura de cuisse de grenouille et sauce à la réglisse. Très bon, les tempura comme la sauce bien que je n’y ai pas décelé la touche de réglisse. Ensuite, des rouleaux au saumon et au wasabi, d’inspiration sushi mais n’ayant plus rien à voir avec : ni algues, ni riz… c’était surprenant et vraiment très bon, croquant entre l’abondance de graines de sésame blond et de sésame noir, des vermicelles de riz, du saumon et du wasabi. Une surprise très réussie. En dernier un bouillon noir aux ailerons de requins, il y nageaient des bouts de tofu, c’était très parfumé et j’ai plutôt aimé.
La cuisine invite à voyager en Asie, c'est une cuisine fusion où à chaque fois l’Asie donne le ton, et plus particulièrement le Japon. Les saveurs sont fines et parfois complexes, les plats sont élaborés avec soin et tendent vers un esthétisme épuré. Certains plats sont vraiment très inventifs, d’autres sont plus des classiques déviés et revisités, et le plus souvent c’est réussi. Mais j’avoue que parfois certaines choses n’étaient pas au top, il reste des points à améliorer côté cuisine, je trouve.
Le patron n’officie pas en cuisine, mais nulle doute qu’il y décide beaucoup de choses, c’est cependant en salle qu’il dispense de son énergie. Il faut dire que les serveurs n’ont généralement pas qu’une petite assiette à vous apporter, non c’est tout une farandole de coupelles et ramequins qui débarquent devant vous. Les serveurs sortent de cuisine avec un plateau, qu’ils déposent sur une petite table adjacente à la votre avant de disposer la dinette devant vous en vous informant de ce que le cuisinier à tenu bon de vous confectionner. N’hésitez pas à vous faire répéter les intitulés des plats si vous n’avez pas entendu ou si vous avez aussitôt oublié, il serait bête de déguster sans savoir.
Pour nous faire patientez avant l’arrivé de l’unique plat commandé, on nous apporte l’attraction de la soirée : du foie gras lyophilisé. Une assiette, au milieu un petit pot contenant autant de mini pailles que de personnes autour de la table, et tout autour de ce petit pots, des petits tas de poudre beige, autant que de pailles. Là vient la scène la plus cocasse de la soirée, rituel que chaque table, l’une après l’autre accomplira. Une première personne s’empare de l’assiette, pioche une paille, et s’applique à « sniffer » sa petite ligne. Les guillemets à sniffer s’imposer car je vous conseille quand même de recueillir la poudre beige avec votre muqueuse buccale plutôt qu’avec votre muqueuse nasale. Ce n’est qu’un conseil. C’est ludique, inattendu et ça a le goût du foie gras en fin de bouche.
Ensuite arrive votre plat, là, plus de surprise, vous avez ce que vous avez demandé. Mes gambas étaient très bien par contre grosse grosse déception en ce qui concerne les soba qui étaient trop cuites (ok, chuis très exigeante en ce qui concerne les soba mais quand même, c’est la moindre des choses) et parmis des bons légumes grillés trônait un ignoble champignon-pas-bon (mais ça c’est peut-être juste mes papilles). Il y a donc des choses à revoir en cuisine quand même, la perfection de sa sœur n’est pas atteinte. Mais en même temps je ne devrais pas comparer deux trucs aussi incomparables. Les lieux et le public sont complètement différents. Ok une cuisine fusion asiatique et un soin tout particulier apporté à la décoration les lieux, mais au R on joue avec un concept original visant à attirer les branchés de la ville, près a accourir pour tester le nouveau restaurant tendance.
Ensuite, le dessert. Là vous avez à nouveau le choix : « Glace aux épices et macarons au piment d’Espelette » « Fondant au chocolat et glace cannelle » « Meringue mousse de gingembre épicé » « Salade de fruits en gelée chantilly citronnelle »…
Libre à vous de finir votre soirée en bas des escaliers, un verre à la main, bien callé entre un majestueux tableau et une guirlande lumineuse...
Mise à jour : ce restaurant est désormais fermé!
R
53, Grand’Rue
67000 Strasbourg
Tel : 03.90.23.53.90
Kaseiki Yin (5 mets) 30€
Kaseiki Juste Milieu (7 mets) 35€
Kaseiki Yang (9 mets) 40€
Du côté des savories: le savory est à 4€50, l'assortiment de 4 savories à 16€ et l'assortiment de 5 savories à 21€
Ouvert uniquement en soirée (sinon c’est pas hype) du lundi au samedi
Note importante : toutes les photos de l’intérieur du lieu ne sont pas les miennes (©Laurianne Ceneda), je n’ai pas osé dégainer et en plus je pense qu’il faisait trop sombre pour avoir des clichés qui tiennent la route.
Les photos viennent d’ici, site découvert récemment et que je trouve plutôt bien fait.